vendredi 16 juillet 2010

Orgie de bus : l'épreuve du Feu !

Il faut attendre plusieurs jours pour dériver sur le fleuve Paraguay en partant d'Asunción... Sans autre guide que quelques pages internet, nous prenons nos renseignements au fur et à mesure de nos rencontres : et c'est parti pour une bonne journée de bus depuis Yaguarón jusqu'au terminal de la capitale (1H30 d'omnibus cahotant s'arrêtant et redémarrant continuellement) où après quelques minutes nous repartons pour une après-midi de route afin de rejoindre Concepción. De là doit partir une bateau sur le rio Paraguay. C'était lundi. Arrivée à la nuit à Concepción où nous refusons une chambre pour en trouver ensuite une où nous passerons la nuit au chaud. Chambre aveugle dans une ambiance de bout de monde... Le genre de boite où on sort nos sacs de couchage ultra légers, histoire d'être sûrs d'un peu de propreté. On n'essaiera pas la douche au matin, préférant les lingettes pour nos ablutions !
Asunción - centre historique près du port.
À quelques mètres du monument des Héros du Paraguay. Plein Centre d'Asunción.

Après le petit déjeuner près du terminal de Concepción, nous refusons un premier "taxi" pour aller au port...


... le véhicule ne nous paraissant pas suffisamment confortable. Pourtant, cheval et conducteur étaient fort sympathiques...
C'est en voiture que nous allons au port où on nous a affirmé la veille le départ du bateau pour Bahia Negra et le Pantanal, à 11H.
Le port est vide ; rien à espérer avant plusieurs jours, une "lancha" étant repartie pour Asunción et l'autre étant en cale sèche pour réparations... Nous reprenons les conseils : c'est en bus qu'il faut avancer. Direction Pozo Colorada pour un second bus vers Loma Plata. Après on continuera de filer vers le Nord.
Partis vers 9H30...









nous arrivons vers 14H à un village perdu à un carrefour où les camions avec remorques de 26 m (!) remplis de bovins côtoient tous les transports et les voyages. Deux stations essence, quelques baraques, un bout de garnison, des voitures, des motos, un bout de cabine de bus avec un auvent faisant office de gare autoroutière. Le tout au milieu d'un paysage de désert d'épineux ponctué de prairies sèches, de sable avec quelques bouts d'étang pour abreuver les troupeaux. Et les balafres rectilignes de bitume desservant les rares villes du pays.
À Pozo Colorado, longue attente. Le bus pour Loma Plata ne part qu'à 18 H. Et les panneaux précisent les conditions de route :

et finalement, tout va bien, le vent est froid mais le ciel est encore bleu. Y'en a d'autres qui viennent de faire 30 km de chez eux et qui partent pour 100 bornes de plus.


Pour nous, 3 H de route supplémentaire pour être peu après 21 H à Loma Plata.
Là, ça se corse au niveau des renseignements : pas moyen d'aller à Bahia Negra. Que de la piste. Que des petits bouts de liaison en "collectivos". Plus de 500 km à faire qui nous sont déconseillés par les habitants. Si on veut aller au Pantanal, il vaut mieux passer par la Bolivie. Ils sont mieux structurés pour le tourisme. Ah bon. C'est vrai que depuis notre arrivée au Paraguay, de touriste, hormis les deux cyclistes d'Asunción, on n'en a pas vu un...
Bien.
Et il y a un bus pour traverser le Chaco. Oui oui. Ils passent au carrefour à 20 km d'ici (c'est à dire d'où on vient - je reconnaîtrai des bouts de ruines de béton entraperçues dans la lueur des phares tout à l'heure). À minuit. Il y a un bout de baraque de la police. On repart donc en arrière... Le chauffeur nous "jette" au carrefour un peu avant 22 H.
   
On va réveiller la maréchaussée qui confirme le passage d'un bus à minuit trente et d'un autre vers 1 H 15. Il fait froid, on s'habille pour lutter contre le vent. L'attente commence. Nous voyons les phares des rares véhicules pendant de longues dizaines de secondes approcher de notre carrefour stratégique. Camions, voitures, camionnettes. Un bus... vers Loma Plata.
Minuit. Minuit et demi. Je fais les cent pas, d'un bout à l'autre du carrefour. 1 H du mat. Toujours rien. Le trafic se fait de plus en plus rare. 1 H 30. Rien. 2 H. Toujours rien...
2 H... On décide d'aller réveiller nos pandores pour quémander un bout de sol propre où mettre nos bouts de matelas et dormir en attendant... Ils nous disent que le bus va passer. Ils s'habillent, me disent que, de toute façon ils doivent faire un contrôle routier. Ils nous installent sur leur bour de terrasse, trois bouts de chaise autour d'un brasero pour nous réchauffer pendant qu'ils font tourner le moteur de leur pick-up.
Et... Plus de quatre heures après notre arrivée, un bus se dessine à notre horizon fatigué ! Les policiers arrêtent le vénérable (en âge) autocar. Il n'y a plus de place assise...
On monte ! Merlin et Patricia vont s'asseoir dans l'allée étroite entre les rangées de sièges défoncés. Jusque vers 7 H du matin où nous allons récupérer deux places.
Quant à moi, c'est une première, je vais rester debout jusqu'à 9 H ! Y'a des nuits blanches qui laissent des souvenirs ! C'est une première. On n'a jamais eu une histoire pareille en voyage !!!
Au passage, il y aura le bureau d'immigration paraguayen vers 3H du mat, avec tous nos sacs qu'on n'avait pas pris le temps de mettre en soute. Au sortir de la douane, déjà bien secoué, je vais me faire soutirer 600 000 guaranis (soit 100 euros) par un des 2 chauffeurs (il me demandait 700 000 au départ, et voyant que c'était exactement la somme qu'il me restait, il m'arrête à 6 billets en disant que ça va comme ça !). Je prends des renseignements immédiatement dans le bus auprès des premiers routards rencontrés : c'est 230 000 guaranis par personne depuis Asunción !
Je file "bloquer" le chauffeur dans la cabine avant qu'on ne reparte et le traite de voleur. J'exige qu'il me rende un quart de la somme. L'assistante a l'argent. Pas de lampe... Qu'à cela ne tienne : je dégaine ma frontale aussi tôt ! Elle sort les 2 billets, me tend 100 000. Garde 50 000... Je montre au chauffeur les St François d'Assise et autres Christs autocollés au-dessus de sa tête et lui fait comprendre qu'ils regardent sa conscience... et leur prend le dernier billet des mains en leur disant que j'ai bien payé !
Évidemment, ils m'ont fait un peu la gueule tout le long du voyage. Mais je n'étais pas près à revenir là-dessus après les heures de station debout !
En prime de nouveautés, dans un voyage au paysage aride et acéré de multiples épineux du Chaco, il y aura encore le passage de la frontière bolivienne. Peut-être 300 km (avec un gros passage de route défoncée) après la paraguayenne ! Au petit jour, avec un douanier ronchon à qui il faut négocier le tampon "90 jours" pour être tranquilles (il avait le 30 jours à la main en disant"ça va comme ça" alors quon avait demandé 45 jours...). Un peu après, nous aurons droit -encore une première !- à une panne... d'essence !!!
Sur un bout de piste de sable, en plein nulle part (ou bien en plein ailleurs ???).
N'oublions pas de préciser que tout cela s'est passé emmitoufflé pour lutter contre les courants d'air et sans rien pouvoir faire pour éviter la poussière continuelle.
Puis, enfin, une arrivée, 18 H après notre départ du carrefour, à Santa Cruz de la Sierra.
Là, ouf, une superbe petite chambre, tout près du centre.
Repos.
 
Le Chaco dans toute sa splendeur. Des km d'épines et de sable.

La panne d'essence...
Les bras m'en tombent !